Bataille de la Marne
(du 5 au 12 septembre 1914)
 
On peut la décomposer en cinq batailles plus restreintes d'est en ouest.
 
 
Bataille de l'Ourcq (du 5 au 9 septembre 1914)

 

La bataille de l'Ourcq désigne les combats du 5 au 9 septembre sur la rive droite de la Marne, entre Nanteuil-le-Haudouin et Meaux, entre la 6e armée française (commandée par le général Maunoury) et l'aile droite de la Ire armée allemande (du général von Kluck).

La 6e armée française se met en marche vers l'est dès le 4 sur ordre du gouverneur militaire de Paris Galliéni, ses têtes de colonne rencontrant le 5 septembre le 4e corps de réserve allemand (laissé en flanc-garde par Kluck), qui contre-attaque en soirée. Les quatre autres corps de la Ire armée allemande sont alors déjà sur la rive gauche de la Marne, en train de s'aligner sur le Grand Morin : les Français menacent ainsi le flanc mais aussi les arrières de Kluck. Les combats s'amplifient les jours suivants, entre Meaux au sud et Nanteuil-le-Haudouin au nord, du 6 jusqu'au 9 septembre.

Côté allemand, l'état-major de la Ire armée renforce très rapidement son flanc en rappelant le 2e corps qui était arrivé à Coulommiers le 5 : dès le lendemain, il est engagé de part et d'autre du 4e corps de réserve. Le 7, c'est au tour du 4e corps d'armée d'arriver, tandis que les deux derniers corps allemands (3e et 9e) retraversent la Marne (ordre du 7 à 10 h 15) : l'ensemble de la Ire armée, qui marchait vers le sud, est ainsi redéployé face à l'ouest. Côté français, face à ces puissantes forces allemandes, la 6e armée reçoit aussi des renforts, cinq divisions envoyées par Galliéni, pour alimenter la bataille : une brigade (de la 7e DI) est même acheminée de Paris à Nanteuil à bord de taxis réquisitionnés.

Le 9, les renforts allemands (le 9e corps) lancent une attaque de Betz vers Nanteuil : la 6e armée française est menacée d'enveloppement par le nord et n'a plus de réserve à engager. Mais à midi, le lieutenant-colonel Hentsch, envoyé par l'OHL, arrive à l'état-major de la Ire allemande et annonce la retraite de la IIe armée depuis le matin. Malgré l'opposition du chef d'état-major Kuhl qui fait état des chances de victoire sur la 6e armée française, le danger sur l'aile gauche oblige la Ire armée à suivre la retraite. Le décrochage allemand se fait dans l'après-midi du 9, les troupes françaises ne poursuivant que très lentement du fait de leur épuisement.

 
Bataille des Deux Morins (du 6 au 9 septembre 1914)
 

La bataille des deux Morins désigne les combats du 6 au 9 septembre en Brie champenoise, d'abord sur le Grand Morin puis sur le Petit Morin, entre d'une part le corps expéditionnaire britannique (commandé par le maréchal French) et la 5e armée française (du général Franchet d'Espèrey) et d'autre part la gauche de la Ire armée allemande (du général von Kluck) et la droite de la IIe armée (du général von Bülow).

Côté allemand, le redéploiement de la Ire armée allemande sur la rive droite de la Marne laisse un intervalle de 40 km entre celle-ci et la IIe armée, masqué par les 1er et 2e corps de cavalerie (total de cinq puis quatre divisions), que l'état-major de la Ire armée ordonne de renforcer par deux brigades d'infanterie (ordre du 8 septembre au 9e corps). Ces expédients retardent l'avance prudente des Franco-Britanniques (cinq divisions d'infanterie du BEF, la division de cavalerie britannique et trois divisions de cavalerie françaises, sans compter la gauche de la 5e armée française), le 6 et 7 sur le Grand Morin, le 7 et 8 sur le Petit-Morin, le 8 sur le Dolloir et la Marne.

Côté français, le GQG n'identifie la brèche qu'à partir du 8, Joffre envisageant alors d'envoyer les Britanniques au nord de la Marne pour menacer les arrières de la Ire armée allemande, tandis que la 5e armée française doit attaquer au nord de Montmirail. Mais le 8 au soir, Henstch arrive à l'état-major de la IIe armée : le lendemain 9 septembre au matin, le chef d'état-major Lauenstein décide avec lui de faire battre en retraite son armée, qui est menacée sur sa droite, derrière la Marne. Les divisions britanniques franchissent au même moment la Marne à Charly et Nanteuil, tandis que la cavalerie française atteint Château-Thierry.

 
Bataille des Marais de Saint-Gond (du 6 au 9 septembre 1914)
 

La bataille des marais de Saint-Gond désigne les combats du 6 au 9 septembre, entre Sézanne et Mailly-le-Camp, entre d'une part la 9e armée française (commandée par le général Foch) et d'autre part la gauche de la IIe armée allemande du général von Bülow et l'aile droite de la IIIe armée du général von Hausen.

Dans la nuit du 4 au 5 septembre, Joffre prescrit à Foch d'entreprendre une action offensive sur les troupes allemandes présentes devant son armée. Le 6 septembre, les troupes françaises commencent leur mouvement vers le nord mais sont rapidement contenues par les troupes allemandes. Foch est contraint d'établir des positions défensives et de les protéger.

Du 6 au 8 septembre, les combats sont de plus en plus intenses, sur l'aile gauche, les troupes françaises s'opposent au Xe corps allemand et à une partie du corps de la Garde, plusieurs villages sont pris et perdus plusieurs fois. Au centre du dispositif français, les troupes présentes au nord des marais de Saint-Gond sont rapidement repoussées mais toutes les tentatives du corps de la garde pour franchir les marais sont bloquées. L'aile droite de la 9e armée française, formée par le 11e corps d'armée subit la pression d'une partie du corps de la garde et du XIIe corps de réserve allemand, elle est obligée de se replier hors des villages de Morains-le-Petit, d'Écury-le-Repos et de Normée.

Le XIIe corps de réserve allemand est renforcé par des troupes du XIIe corps d'armée et soutenu par la 2e division de la Garde, au cours d'une attaque de nuit entre le 8 et le 9 septembre, l'aile droite française est enfoncée entraînant le repli des troupes au centre du dispositif de la 9e armée française. Dans la journée du 9 septembre, Foch prend le contrôle du 10e corps d'armée français, initialement aux ordres de la 5e armée française, sur son aile gauche. Il peut ainsi dégager la 42e division d'infanterie pour se constituer une réserve. L'aile gauche de la 9e armée est fortement attaquée, elle cède le village et le château de Mondement, un point d'observation qui domine le champ de bataille. Le soir même, le 77e régiment d'infanterie soutenu par l'artillerie de la 42e division d'infanterie et par la division marocaine reprend le château.

La 42e division est dirigée vers Fère-Champenoise pour combattre les troupes allemandes qui en débouchent. Le 10 septembre devant la pression de la 5e armée française, la IIe armée allemande entame un mouvement de repli pour éviter l'enveloppement. Ce mouvement entraîne également le repli des troupes de la IIIe armée allemande. Foch et son armée restent maîtres du champ de bataille et entament la poursuite des troupes allemandes.

 
Bataille de Vitry (du 6 au 10 septembre 1914)
 
 

La bataille de Vitry désigne les combats du 6 au 10 septembre en Champagne crayeuse, de part et d'autre de la ville de Vitry-le-François entre l'aile gauche et le centre de la 4e armée française commandée par le général de Langle de Cary et l'aile droite de la IVe armée allemande du duc de Wurtemberg et l'aile gauche de la IIIe armée allemande du général von Hausen.

Les attaques allemandes au centre du dispositif de la 4e armée française entraînent le resserrement de sa ligne de front, le 17e corps d'armée initialement chargé de la liaison avec la 9e armée français est contraint de prêter main forte aux troupes attaquées. Ce mouvement est masqué dans un premier temps par la 9e division de cavalerie puis à partir du 8 septembre par l'arrivée des Vosges du 21e corps d'armée. Ce renfort permet d'attaquer la IIIe armée allemande puis de commencer l'enveloppement de la IVe armée allemande à partir du 10 septembre.

 
Bataille de Revigny (du 6 au 12 septembre 1914)
 

Y ont participé :

  • Marius SUMIEN de Varages (312ème RI), tué le 7 septembre 1914 à Beauzée-sur-Aire (Meuse).
  • Louis MOUTTET de Tourves (112ème RI), tué le 8 septembre 1914 à Vassincourt (Meuse).
  • Auguste LEYDET de Rians (112ème RI), tué le 8 septembre 1914 à Vassincourt (Meuse).
  • Emile COQUILLAT de Barjols (112ème RI), tué le 10 septembre 1914 à Vassincourt (Meuse).
  • Henri LOMBARD de Ginasservis (111ème RI), tué le 10 septembre 1914 à Vassincourt (Meuse).
  • Marius CAMOIN de Saint-Zacharie (173ème RI), mort des suites de ses blessures, le 11 septembre 1914 à Couvonges (Meuse).
 
La région de Vassincourt, un point faible dans le dispositif
 
A l'est, la IIIème armée du Général Sarrail tient le front de Verdun à Bar le Duc. A sa gauche, de Bar le Duc à Mailly, se tient la IVème armée commandée par le général de Langle de Cary. A la charnière de ces deux armées, dans la région de Revigny sur Ornain, la IVème armée allemande commandée par le Duc de Wurtemberg pousse une offensive pour rompre le front sur un point faible du dispositif. Cette situation explique l'acharnement et la violence des combats qui vont se dérouler, dans cette région et notamment autour de Vassincourt.
 
6 septembre 1914 - Déclenchement de la bataille
 
Lorsque la bataille s'engage, c'est le 5ème Corps de la IIIème Armée qui tient le secteur de Revigny. Alors que le plan du Généralissime Joffre prévoyait une attaque française, ce sont les troupes allemandes qui prennent l'initiative. Les villages de Nettancourt et Sommeilles sont perdus, tout comme Noyers qui doit être évacué. Tout au long de la journée, les forces allemandes accentuent leur poussée pour briser la liaison entre les IIIème et IVème Armée. Malgré une défense pied à pied du 5ème Corps, Villers aux Vents, Brabant le Roi, Revigny, Laimont sont abandonnés. Au soir du 6 septembre, les pertes humaines sont lourdes de part et d'autre, le front a reculé et s'établit dorénavant sur la ligne Vassincourt, Louppy le Château, Villotte.
 
7 septembre 1914 - Le 15ème Corps d'Armée en renfort
 
Au matin du 7, les offensives allemandes redoublent de violence sur la " trouée de Revigny " entre les IIIème et IVème Armées françaises. L'objectif allemand est de réussir une percée qui ouvrirait la route vers Bar le Duc et Saint-Dizier. Au centre du dispositif, le plateau de Vassincourt est un enjeu déterminant. Le 15ème Corps composé de soldats originaires du sud de la France, soustrait par Joffre à la IIème Armée, vient renforcer la IIIème Armée du Général Sarrail. La 29ème Division prend position à l'ouest de Vassincourt entre Couvonges, que ses bataillons de chasseurs occupent le soir, et Véel. Toute la journée, le 5ème Corps, qui se repositionne à l'est, entre Vassincourt et Villotte, subit une pression considérable des troupes allemandes et un bombardement intense. Vassincourt est disputé avec acharnement mais doit être abandonné par les troupes françaises au soir de cette journée.
 
8 septembre 1914 - Première offensive du 15ème Corps
 
Les deux Divisions du 15ème Corps (29ème et 30ème) sont maintenant complètement en position et prennent l'offensive. Dès le matin, la 29ème attaque à l'ouest de Vassincourt vers Revigny. L'offensive est un échec et la division reprend position au sud ouest de Vassincourt dans les bois de Couvonges. Dans l'après midi du 8, la 30ème Division progresse dans la vallée de la Saulx et se positionne devant Mognéville vers 23 heures. A l'est de Vassincourt, le 5ème Corps est en difficulté sous des bombardements puissants et doit céder du terrain en se repliant vers Louppy-le-Petit et Lisle-en-Barrois.
 
9 septembre 1914 - Nouvelle offensive des 5ème et 15ème Corps
 
A 3 heures du matin, le 9 septembre, le 15ème Corps, appuyé à sa droite par le 5ème Corps, reprend l'offensive en Direction de Vassincourt. Les combats sont meurtriers. Sous un duel d'artillerie intense, attaques et contre-attaques se succèdent. Au soir, le village de Vassincourt est en flamme, les troupes françaises qui ont légèrement progressées, enserrent Vassincourt et ont pris Mognéville à l'ouest.
 
10 septembre 1914 - Le 15ème Corps poursuit son offensive

 

Le 10 septembre, le 15ème Corps poursuit son offensive. A l'ouest, la 30ème Division progresse, dans la vallée de la Saulx, en direction de Contrisson, dépasse Mognéville et arrive aux abords d'Andernay. Autour de Vassincourt, les combats sont toujours aussi acharnés, la progression est moindre et les Allemands qui tiennent toujours, ont mis le feu au village.
 
11 septembre 1914 - Prise de Vassincourt
 
Le 11 au matin, les patrouilles françaises constatent que l'ennemi a abandonné ses positions dans Vassincourt. Vers 13 heures, les troupes françaises entrent dans le village complètement détruit et brûlé. Le spectacle est désolant, pas une maison intacte, des cadavres français et allemands jonchent le sol et remplissent les tranchées Les troupes du Duc de Wurtemberg battent en retraite.
 
12 au 14 septembre 1914 - La retraite allemande
 
Dans les jours suivant la prise de Vassincourt, la retraite allemande se confirme. Le 12 septembre, le 15ème Corps reprend Revigny. Les jours suivants, placé dans le dispositif entre les 6ème et 5ème Corps, il contribue à la poursuite des troupes allemandes vers l'Argonne.
 
Suites et conséquences
 

Le coup d'arrêt de la Marne marque l'échec de la manœuvre allemande à travers la Belgique et le Nord de la France (surnommée « plan Schlieffen »). Mais, selon le mot du général Chambe, alors jeune officier de cavalerie, « ce fut une bataille gagnée mais une victoire perdue » : en effet, si les armées franco-britanniques mirent alors un terme à l'avancée irrésistible des armées allemandes commandées par Moltke, elles ne purent ou ne surent exploiter cet avantage en repoussant ces armées hors du territoire français. D'une part, les troupes françaises sont trop épuisées et affaiblies pour se lancer dans une poursuite. D'autre part, l'état-major allemand avait redéployé une partie de ses forces, envoyant de Lorraine plusieurs corps d'armée en renfort sur leur aile droite.

L'aile droite allemande s'arrête dès le 13 septembre, s'installant sur les rives de l'Aisne : les attaques françaises et britannique n'arrivent pas à les repousser lors de la bataille de l'Aisne et cette partie du front se stabilise en s'enterrant dans des tranchées.

Les belligérants recherchent alors la décision par une série de tentatives mutuelles d'enveloppement vers l'ouest, puis vers le nord, qui les mènent jusqu'aux rives de la mer du Nord, lors des combats appelés la « course à la mer » (septembre à novembre 1914).