2 décembre 1805 : La bataille d'Austerlitz

 
Bélligérants
 
Empire français
Empire russe
   
Empire d'Autriche
 
Commandants
 
  Empereur Napoleon 1er   Alexandre 1er de Russie
      François 1er d'Autriche
 
Forces en présence
 
  73 200 hommes   85 400 hommes
  139 canons   278 canons
 
Pertes
 
  1 290 morts et 6 943 blessés   16 000 morts ou blessés
  573 prisonniers   15 000 prisonniers
  1 drapeau (celui du 4e de ligne)   180 canons (ils serviront à fondre la colonne Vendome à Paris)
      45 drapeaux
 
Contexte
 

Même si Napoléon a vaincu une première fois les Autrichiens à Ulm, il est loin d’avoir vaincu l’ensemble des forces de la coalition : Napoléon poursuit l’armée russe de Koutouzov. Au fur et à mesure que celui-ci bat en retraite, il ne cesse de se renforcer tandis que la Grande Armée se dilue, à 1 000 km de ses bases. En Italie, Masséna est incapable de battre l’archiduc Charles malgré son écrasante supériorité numérique ; Napoléon doit alors se priver de Ney et de Marmont qui partent pour le Tyrol (afin d’éviter que l’archiduc Charles n’échappe à Masséna puis menace l’aile droite de la Grande Armée). L’empereur des Français doit aussi se priver d’Augereau, car un autre archiduc, Jean-Baptiste, tente de lever une armée en Bohême. Pis encore, la Prusse prépare son entrée en guerre et promet à Alexandre Ier d’attaquer les Français à la mi-décembre, lors d’une réunion secrète du tsar Alexandre et du roi Frédéric-Guillaume III de Prusse fin octobre au château de Potsdam.

Le lendemain de la capitulation d’Ulm survient le désastre naval de Trafalgar, mais Napoléon n’apprend cette nouvelle que le 1er novembre. Après avoir libéré Munich, la Grande Armée descend le Danube pour prendre Vienne et chercher la bataille décisive avec les Russes. Napoléon estime les effectifs de Koutouzov à plus de 100 000 hommes. En fait, le maréchal russe ne dispose que de 36 000 soldats fatigués renforcés par 22 000 Autrichiens démoralisés après la reddition d’Ulm, Koutouzov décide de battre en retraite pour faire liaison avec des renforts russes et autrichiens, malgré les suppliques de François II pour défendre Vienne et il charge Bagration, son meilleur subordonné, de couvrir sa retraite avec ses divisions.

Pendant ce temps, Napoléon espère livrer bataille à Saint-Pölten (Sankt Pölten), mais le 11 novembre, Koutouzov, renforcé par 10 000 Autrichiens et ayant repris de l’assurance, fond avec 15 000 hommes sur la division de Mortier, dans le défilé de Dürrenstein. Pris de front, de flanc et par l’arrière, les Français résistent et combattent à un contre trois, et mettent finalement hors de combat 2 600 Russes.

Napoléon ordonne à Murat de prendre Vienne, l’accusant d’avoir laissé Mortier seul et de ne pas avoir contre-attaqué les Russes, tandis que Bernadotte franchit difficilement le Danube à cause d’une subite crue du fleuve. Le 13 novembre, Murat et Lannes prennent Vienne sans coup de feu.

Les deux lieutenants de Napoléon parviennent alors à s’emparer du pont de bois de la ville en affirmant à l’officier chargé de le faire sauter qu’un armistice a été signé entre Napoléon et François II. Aussitôt, Bessières et Soult franchissent le fleuve. Le lendemain, Murat attaque avec sa cavalerie l’arrière-garde de Bagration. Les russes parviennent à s’échapper en employant le même stratagème, laissant croire à Murat qu’une négociation d’armistice est en train de se dérouler. Celui-ci arrête son attaque.

Koutouzov est à Olmütz (maintenant Olomouc), en Moravie, où il opère sa jonction le 19 novembre avec la 2e armée russe du général Buxhowden et le corps autrichien du prince de Liechtenstein. L’armée coalisée compte alors 86 000 hommes. Le surlendemain, Napoléon arrive à Austerlitz, à 100 km de Vienne avec 73 000 hommes.

 
Déroulement de la bataille
 

Ce piège de Napoléon Ier consiste à faire croire à l'ennemi que ses forces sont trop faibles pour vaincre. Pour ce faire, il utilise de nombreuses ruses (organiser le repli de ses troupes lors d'affrontements ou d'escarmouches, demander à être reçu par les autres empereurs comme pour négocier, etc.). Les ennemis pensent alors que Napoléon ne dispose que de 40 000 hommes (au lieu de 73 400). Koutouzov n'en est pas persuadé mais les jeunes généraux (nobles ayant acheté des charges, donc peu expérimentés) veulent briller devant leur empereur et foncent dans le piège, sans attendre les renforts du sud.

Le champ de bataille d’Austerlitz est un vaste rectangle de huit kilomètres sur douze. Il est délimité au nord par la route Olmütz-Brünn et à l'ouest par la route Vienne-Brünn. Au sud, des étangs gelés ferment le champ de bataille. Entre le Goldbach et la Littawa, deux ruisseaux formant un V, le plateau de Pratzen est la pièce maîtresse de la zone. La neige hivernale, encore peu épaisse, gomme les dénivellations.

Pendant deux jours, Napoléon étudie scrupuleusement le futur champ de bataille qu’il a choisi : il mémorise chaque haie, chaque fossé, chaque bosquet… Il conseille alors à ses maréchaux : « Jeunes gens, étudiez bien ce terrain, nous nous y battrons ; vous aurez chacun un rôle à jouer ».

 
Le plan et le dispositif français
 

Après la réunion des armées alliées, les Austro-Russes ont une nette supériorité numérique. Napoléon se résout donc à une bataille défensive ; il rassemble ses forces et convainc ses adversaires qu’il refuse la bataille en battant en retraite et en abandonnant, le 28 novembre, le plateau de Pratzen, de haute valeur tactique. Le même jour, il sacrifie aux Cosaques les cavaliers du général Treilhard. Après une marche agressive de trois mois, ce repli et cette défaite apparaissent aux yeux des coalisés comme un aveu de faiblesse et réconforte le tsar, qui a refusé la proposition de Koutouzov de retraiter jusqu’en Galicie.

Napoléon, pour persuader psychologiquement ses adversaires qu’il est à la veille d’une défaite certaine, envoie Savary, son aide de camp, faire des propositions de paix. Le tsar refuse mais, le 30 novembre, il envoie tout de même Dolgoroukov, un prince arrogant et impertinent. « Celui-ci, plus habitué aux bals à Saint-Pétersbourg qu’aux bivouacs, est saisi de surprise quand il voit Napoléon sortir d’un fossé, la figure sale et mal accoutrée » raconte dans ses Mémoires le général Andrault, un émigré français qui a proposé ses services au tsar. Dolgoroukov donne les conditions de paix du tsar : l’abandon de la rive gauche du Rhin par la France. Napoléon refuse net mais Dolgoroukov est convaincu de la victoire des coalisés. À son retour, il déclare : « Napoléon tremblait de peur. J’ai vu l’armée française à la veille de sa perte. Notre avant-garde suffirait à l’écraser ».

Pour persuader tactiquement les alliés, Napoléon place peu de troupes sur son flanc droit. Il prévoit que les Alliés, voyant le point faible du dispositif français, quitteront leur position dominante, c’est-à-dire le plateau de Pratzen, pour envelopper les Français et leur couper la route de Vienne, car ils croient qu'elle est indispensable aux Français pour battre en retraite en cas de défaite, alors qu'en fait, l'Empereur se serait replié sur Paris. Au centre, Soult et ses 20 000 hommes, contre-attaquera et coupera l’armée ennemie en deux en attaquant le plateau de Pratzen laissé sans défense. Lannes (15 000 fantassins) et Murat (8 000 cavaliers), au nord, défendront leurs positions. Pour renforcer son flanc droit, Napoléon prie Davout de quitter Vienne, où ses troupes sont stationnées, et de le rejoindre à marche forcée. Les 8 000 soldats de Davout parcourront alors les 110 km qui les séparent du champ de bataille en 48 heures (36 heures de marche). De plus, il place la cavalerie de Margeron au château de Sokolnitz et dispose la division Legrand à Sokolnitz (il ordonne également au 3e régiment de ligne de Legrand de tenir Telnitz jusqu’à l’arrivée de Davout). Enfin, la Garde Impériale (5 000 grenadiers) et le 1er corps de Bernadotte (12 000 hommes) restent en réserve. Le positionnement des Français pour la bataille fut envoyé aux différents maréchaux dans le bulletin Dispositions générales pour la journée du 11 Frimaire an XIV (2 décembre 1805). L’artillerie française compte 139 canons.

 
Le plan et dispositif allié
 

Le 1er décembre, un conseil de guerre se réunit pour discuter du plan de bataille pour l'affrontement du lendemain. Koutouzov et Andrault, méfiants devant la conduite de l’Empereur des Français, veulent temporiser pour attendre l’archiduc Charles. Celui-ci, parti d’Italie, est le seul qui puisse se mesurer à Napoléon, l’ayant déjà beaucoup rencontré dans le passé (l’archiduc Charles a conduit la retraite de l’armée autrichienne pendant la 1re campagne d’Italie). Mais le tsar, encouragé par de jeunes nobles ambitieux mais sans expérience, choisit Weyrother, un général autrichien. Celui-ci a organisé les manœuvres de l’armée des Habsbourg l’année précédente sur ce même emplacement. Son plan d’attaque prévoit d’utiliser le corps de Bagration pour faire une attaque de diversion au nord tandis que la majeure partie de l’armée alliée attaquera au sud le flanc droit dégarni des Français avec 40 000 hommes en quatre colonnes et prendre les Français dans un mouvement tournant : « J’emploierai demain contre Bonaparte la même manœuvre qui lui avait servi à battre les Autrichiens à Castiglione. La victoire est certaine » déclare Weyrother au tsar.

L’armée austro-russe compte 85 000 hommes, dont 15 000 Autrichiens. À la droite du dispositif allié se trouve le corps de Bagration (environ 15 000 hommes) ; au centre, Kolowrat (17 000 hommes) et à gauche, 43 000 hommes (formés en quatre colonnes) sous les ordres de Przybyszewky, Andrault, Dovtorov et Kienmayer). En réserve, Weirother place les 4 000 hommes de la Garde Impériale russe (sous les ordres du frère du tsar, le grand-duc Constantin) et la cavalerie du prince de Liechtenstein (7 000 cavaliers). L’ensemble de l’artillerie alliée compte 278 canons.

 
La nuit du 1er décembre au 2 décembre
 

Le 1er décembre, à 20 heures 30, Napoléon réunit ses maréchaux pour un dernier conseil : chacun désormais sait précisément son rôle pour le lendemain. À 22 heures, il part à cheval avec une escorte de vingt chasseurs rejoindre le sud du champ de bataille afin d’entendre les Russes prendre leurs positions sur le plateau de Pratzen. Dans l’obscurité, ils dépassent les positions françaises et des Cosaques surgissent de la nuit, mais l’escorte de l’empereur les repousse. De retour dans les lignes françaises, ils s’arrêtent dans le bivouac du 13e de ligne des régiments de Vandamme, du corps de Soult. Dans l’obscurité, l’Empereur se heurte à une souche d’arbre : un chasseur de son escorte l'éclaire en allumant une poignée de paille et en la fixant sur un bâton. Un an jour pour jour après le sacre de Napoléon, toute la compagnie l’imite et 70 000 hommes répartis en douze bivouacs, font de même puis renouvellent les feux pendant plus d’une heure. Voyant ce spectacle, les Russes et les Autrichiens croient que les Français brûlent leurs campements, sûrs de leur défaite.

Confiant à ses aides de camps que cette nuit du 1er au 2 décembre était la plus belle soirée de sa vie, Napoléon s’endort vers minuit, rassuré du mouvement des russes sur sa droite, dans l'auberge où il a établi son quartier général, non loin de la route Olmütz-Brünn. Dans le château d’Austerlitz, Alexandre ne se réveille qu’à quatre heures tandis que François II a attendu l’aube, soucieux.

Dans la nuit, des patrouilles de reconnaissance françaises remarquent que les russes marchent plus au sud que prévu : Napoléon ordonne alors à Davout de gagner Telnitz, à l’extrême sud du champ de bataille, afin de les stopper entre les villages de Telnitz et Sokolnitz, distants l’un de l’autre de 800 mètres. La division Friant, composée de vétérans d’Italie et d’Égypte et surnommée « la division de fer », harassée de fatigue après sa marche, quitte son bivouac vers 4 heures et part pour Telnitz.

 
Napoléon bivouaque avec ses troupes la veille de la bataille - Louis François LEJEUNE (1775-1848)
 
Les assauts sur Telnitz et Sokolnitz
 
Les positions françaises (en bleu) et alliées (en rouge) vers 8 heures le 1er décembre 1805. Carte du Département d’histoire de l’Académie militaire des États-Unis.
 

Le 2 décembre 1805, à 4 heures du matin, les 4 colonnes alliées quittent le plateau de Pratzen et marchent sur le flanc droit des Français. À 6 heures, les divisions de Soult (Vandamme et Saint-Hilaire), cachées par le brouillard, franchissent le Goldbach en silence et attendent le signal de l’attaque.

À 7 heures, Kienmayer envoie son avant-garde à l’assaut de Telnitz, mais elle est repoussée par le 3e régiment de ligne de Legrand. Quelques minutes plus tard, Kienmayer lance 3 000 Autrichiens et 600 cavaliers pour prendre la petite bourgade. Ceux-ci arrivent à percer la ligne française jusqu’à l’église du village, mais les Français culbutent les Russes dans une contre-attaque. À 7 heures 30, les troupes de Davout relèvent le 3e régiment.

À 8 heures, l’état-major allié s’impatiente : Kienmayer a perdu l’ensemble de ses troupes dans une troisième attaque vaine tandis que la 2e colonne du général Andrault a perdu une heure dans l’exécution de sa manœuvre. En effet, à 6 heures, Andrault est bloqué par 4 000 cavaliers de Jean de Liechtenstein ; or cette cavalerie devrait se trouver à 2 km derrière lui. Excédé, il alerte le général de cavalerie et lui démontre son erreur : ce dernier a confondu les villages de Krzeniwitz et de Pratzen. Mais ce dernier préfère attendre le jour pour replacer son unité car il ne veut plus se perdre dans l’obscurité. Alexandre-Louis Andrault finit par passer outre et fait marcher sa colonne devant les Autrichiens, tandis que Doctorov (ou Dokhtourov), ne voyant ni les troupes d'Andrault sur sa droite ni Kienmayer devant lui, arrête sa colonne. Tout le plan de Weirother est compromis.

À partir de 8 heures 30, le général Andrault attaque Sokolnitz. Après un violent bombardement, la colonne d'Andrault pénètre dans Sokolnitz que les Français ont abandonné. Mais ceux-ci se reforment à l’arrière tandis qu’une poignée d’hommes se réfugie dans le château, résistant à tous les assauts des Russes. Finalement, les Français contre-attaquent et repoussent les Russes hors du village. Au même moment, Doctorov lance régulièrement plusieurs attaques sur Telnitz, forçant les Français à battre en retraite derrière le village, mais à chaque fois, une charge de dragons force les Russes à quitter la bourgade. Telnitz change ainsi trois fois de mains en une demi-heure. Finalement à 9 heures, Doctorov et Andrault prennent Telnitz et Sokolnitz dans une dernière attaque. Davout et ses aides de camp se demandent alors combien de temps ils pourront encore empêcher avec 1 500 hommes l’avancée des Russes. Mais ceux-ci ont cessé leurs attaques, car Napoléon vient d’attaquer.

 
L’attaque du plateau de Pratzen
 
L’attaque décisive du corps de Soult sur le centre allié et la contre-attaque de la Garde impériale russe. Carte du Département d’histoire de l’Académie militaire des États-Unis.
 

La surprise est totale chez les Russes : les colonnes de Przybyszewski et de Kolowrat sont assaillies de flanc et en plein mouvement. Les divisions de Saint-Hilaire et de Vandamme chargent et s’enfoncent à l’arme blanche dans les rangs russes. Le combat, d’une rare violence, ne dure que quelques minutes. Les Russes de Kollowrath sont culbutés, entraînant les soldats de Pryzbyszewski dans leur débandade. À 9 heures, les Français sont maîtres du plateau, au sommet duquel Soult installe ses canons.

Koutouzov, voyant ses pires craintes se confirmer, prélève alors des unités des troupes d'Andrault et de Doctorov pour reprendre Pratzen. Ces ordres provoquent ainsi dans la 1re et 2e colonne une véritable cohue entre les unités descendant du plateau et celles montant à l’assaut. Le général Andrault envoie un de ses régiments à l’attaque : l’artillerie de Soult le harcèle pendant qu’il remonte le plateau, creusant de larges trous dans les rangs serrés des Russes, puis une décharge de la mousqueterie de Saint-Hilaire force Andrault et ses troupes à abandonner. Pour aider Soult, Napoléon envoie Bernadotte, jusque-là tenu en réserve, au nord du plateau tandis que la Garde Impériale est envoyée à Pratzen.

Vers 11 heures, Koutouzov envoie toutes ses réserves reconquérir le plateau : il envoie les 4 000 soldats de la garde à pied russe. Mais celle-ci, mal commandée et peu entraînée, part de trop loin et arrive essoufflée devant le 4e régiment de ligne français. Commandés par Joseph, le frère aîné de Napoléon, les voltigeurs français prennent rapidement le dessus sur l’élite de l’armée russe et les poursuivent, la baïonnette dans les reins.

Profitant de la faiblesse de cette unité de voltigeurs, infanterie légère peu armée qui n’aura pas le temps de se former en carré, seule formation d’infanterie efficace contre la cavalerie, Koutouzov contre attaque en envoyant dix escadrons de cavalerie lourde. Le choc est brutal et après une vaine résistance des Français, les cavaliers russes s’emparent de l’aigle du régiment. Aussitôt, Rapp et ses 375 mamelouks de la cavalerie de la Garde chargent les Russes en criant : « Faisons pleurer les dames de Saint-Pétersbourg ». À un contre quatre, les Français se battent furieusement (un mamelouk revient à trois reprises apporter à l’Empereur un étendard russe ; à la 3e fois, Napoléon veut le retenir, mais il s’élance de nouveau et ne revient plus) et les chevaliers de la Garde de Constantin sont battus. Leur chef, le colonel Repnine, fait prisonnier, est présenté comme « trophée » à Napoléon.

Avec l’échec de la Garde russe, la bataille est perdue pour les Alliés : l’armée est coupée en deux. Au sud, Andrault et Doctorov, isolés, battent en retraite tandis qu’au nord Bagration résiste aux assauts de Lannes et Murat ; malgré de lourdes pertes, il bat en retraite en bon ordre.

 
L'hallali
 
A 14 heures, l’armée alliée est coupée en deux : Napoléon attaque l’aile sud de l’armée austro-russe sans se préoccuper de l’aile nord, provoquant la débandade à travers les étangs gelés de Menitz et Satschan. Carte du département d’histoire de l’Académie militaire des États-Unis.
 

À 14 heures, Koutouzov étudie seul les voies de retraite, le tsar et tout l’état-major ayant déjà fui une heure plus tôt. Au centre, Kollowrath, la Garde russe et la cavalerie de Liechtenstein sont en pleine déroute et retraitent vers l’est. Au sud, Napoléon ordonne à Soult de quitter le plateau de Pratzen et de couper la retraite aux 1e et 2e colonnes russes, tandis que Davout fait pression à l’ouest et reprend Sokolnitz.

À 15 heures 30, n’écoutant plus leurs officiers, 20 000 Russes fuient en désordre et espèrent échapper à l’encerclement en traversant les marais et les étangs gelés proches des villages de Menitz et de Satschan. Mais quand l’artillerie française tire pour briser la glace, les hommes et leur matériel s'enfoncent dans l'eau. Paniqués et gelés, 2 000 Russes parviennent à regagner la rive où ils sont immédiatement faits prisonniers. La question de l’enfouissement dans les étangs de Menitz des 10 000 Russes a longtemps fait débat : Suchet, chargé par Bonaparte de vider les étangs de Menitz et de Satschan, ne trouva le 4 décembre que 36 canons, 138 chevaux et 3 cadavres ; mais il n’exclut pas que les villageois des alentours n’aient enterré précipitamment des centaines de noyés. La victoire française est indiscutable.

Andrault décrit la panique des Russes : « Il faut avoir été témoin de la confusion qui régnait dans notre retraite (ou plutôt de notre fuite) pour s’en faire une idée. Il ne restait pas deux hommes d’une même compagnie ensemble […] les soldats jetaient leurs fusils et n’écoutaient plus leurs officiers, ni leurs généraux ; ceux-ci criaient, fort inutilement, et couraient comme eux. »